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La Mode peut-elle se passer du neuf ? #secondemain #modecirculaire #conférence

Dernière mise à jour : 18 mars 2023

En tant que styliste et consommatrice de mode, j'ai régulièrement acheté en seconde-main : plus jeune, je n'avais pas forcément les moyens d'acheter du neuf mais aussi par engagement écologique. Lorsque j'ai étudié la mode à Duperré au début des années 2000 (Vestiaire Co. ou Vinted n'existait pas), la pratique a pris une ampleur créative : apprenti designer, je chassais les pièces uniques dans les quelques friperies et magasins vintage du 18e, chez Guerissol et dans les vide-greniers pour dénicher des pièces d'inspirations pour mes créations, mais aussi pour s'habiller stylé et original 😎


Le mois dernier, je suis intervenue au salon international Texworld pour une conférence sur la seconde main. En effet, les business modèles de mode circulaire peuvent contribuer à relever les défis environnementaux de la mode :


💨 Selon une étude de WRAP*, la location de vêtements plutôt que l'achat de neufs peut réduire les émissions de carbone jusqu'à 80%.


🪡 Réparer et revendre : en prolongeant la durée de vie d'un vêtement de seulement neuf mois, cela permettrait de réduire son empreinte carbone, déchets et eau de 20 à 30%.


🤑 Enfin, selon ThredUp*, le marché de la revente devrait atteindre 64 milliards de dollars d'ici à 2024 et pourrait réduire les émissions de carbone jusqu'à 17 millions de tonnes par an.



Passionnée par les bénéfices environnementaux de ces nouvelles pratiques, je me suis rendue à la conférence "La Mode peut-elle se passer du neuf ?" à La Caserne le 15 mars 2023 pour écouter des professionnels à propos des enjeux et des opportunités de la mode circulaire et de la seconde main. Je vous partage ici un compte rendu des infos les plus pertinentes que j'ai pu relever.




Andrée Anne Lemieux, représentant l'Institut français de la Mode, a partagé sa récente expérience d'une visite de la fondation OR à Accra, au Ghana. Confrontée à la réalité du plus grand marché de seconde main au monde, elle nous partage que :


Chaque semaine, 15 millions de vêtements considérés comme des déchets textiles sont importés d'Amérique du Nord, d'Asie, d'Europe et de Chine au Ghana.

♻️ Au marché de Kantanamo, 30,000 personnes pluridisciplinaires sont dédiés au business de la seconde main : les recycleurs, trieurs, vendeurs et créateurs re-manufacturent 25 millions de vêtements chaque mois. Ils sont réparés, transformés, ou adaptés aux morphologies et revendus localement, en Afrique.


🗑 La fast fashion a entraîné une montée en puissance des déchets textiles : matières et finitions de mauvaise qualité sont les principaux vecteurs de la fin de vie accélérée de ces vêtements.


🌊 Arrivés au Ghana, 40% de ces vêtements sont ainsi déjà inutilisables et finissent en décharge et enfin dans la mer lors de pluies violentes.


🔍 Pour remédier à cette situation, Lemieux a appelé à prendre conscience des conséquences de la mode jetable et à questionner nos habitudes de consommation.


🧑🏼‍🎨 Coté marque et designer, elle note que la fin de vie des habits est encore trop occultée.


En effet, en amont, lors de la création des vêtements, il existe pléthore de pratiques de conception plus durable pour réduire notre impact environnemental et valoriser le produit pour une seconde vie : choix de matières recyclées, biodégradables, régénératrices, et résistantes ; une confection et des finitions robustes, un patronage optimisé zéro-waste, la co-création avec le client final,...je vous en dirais plus dans de prochains posts.

La fondatrice de Studio Paillette, une plateforme de location avec une proposition ultra mode et créative en B2C, a souligné que la location de vêtements de qualité pouvait optimiser leur durée de vie et être une alternative à la fast-fashion. Léa Germano soutient son propos en citant que "Les tenues achetées pour une occasion spéciale (mariage, soirées,...) sont portés en moyenne 7 fois" (OXFAM) tandis que la location permet un nombre beaucoup plus important d'utilisations. Pour les clients, cela représente aussi une accessibilité financière et une expérience de la mode plus responsable.


Sophie Pignères, représentant WeTurn, a partagé sa vision d'une filière de recyclage à 100% en boucle fermée. L'entreprise collecte les invendus et les stocks dormants pour les transformer en fil puis en textile, valorisant ainsi les ressources disponibles en Europe.


Sophie Pignères a appelé à un "changement de paradigme pour les marques, qui devrait considérer leurs stocks comme une ressource à revaloriser plutôt qu'un déchet."

WeTurn propose un modèle économique de marque écoresponsable, où le neuf représenterait un tiers de l'offre, tout comme la seconde main et le recyclé.


Aymeric Dechin de Faume, une solution complète d'intégration web de la seconde main pour les marques, liste les opportunités de la seconde main pour les marques :


💰 La location et la seconde main permettent une accessibilité tarifaire pour tous et la possibilité pour les marques de générer des flux de revenus tout au long du cycle de vie du produit.


🛍 Proposer une alternative à la fast fashion pour les client.es qui ne peuvent pas (encore) acquérir de pièces de bonne facture.


Pour contribuer, outre de proposer une offre qualitative à un tarif public minimum de 80€ afin que le service de seconde main soit rentable, il est aussi nécessaire d'éduquer son client à mieux entretenir son vêtement, et de proposer par exemple des services de réparation sur son site e-commerce comme la coopération entre la marque Ba&sh et le service de couture Tilli qu'ils viennent d'intégrer.


Afin de mesurer la rentabilité et l'impact écologique d'une démarche de revente ou de location au sein d'une marque, il existe des enjeux de traçabilité pour mesurer le nombre de reventes. En effet, des solutions digitales sont en cours de développement pour suivre les multiples vies d'un vêtement à l'aide de marquage et de réseaux sécurisés.


Enfin, Studio Paillette a proposé que la rentabilité ne se limite pas au volume de produits vendus, mais plutôt au nombre d'utilisations d'un produit.


Dans l'ensemble, les intervenants ont souligné l'importance de la collaboration entre les différents acteurs de l'industrie pour atteindre une vision commune de la mode circulaire, où le neuf, le recyclé et la seconde main cohabitent avec cohérence et soit rentable pour les marques.


Ces business modèles qui grandissent ne représentent pour l'instant que 13% du marché mondial de la mode (McKinsey), mais ce sont des alternatives concrètes à la fast fashion et à ses impacts dévastateurs sur les humains et l'environnement.


Pour ma part, je teste la pratique de l'abonnement : je viens de recevoir un total look jean chez Mud Jeans,(en coton bio et recyclé, fabriqué en Turquie). Le principe est assez simple : je paierai en moyenne 10 euros par mois pendant 1 an pour chaque pièce.

Au bout d'un an, je peux garder ces pièces ou si je ne les porte plus, je pourrai les renvoyer à la marque pour les recycler et m'abonner à d'autres pièces.

On s'en reparle dans 1 an.




*Source : WRAP, Valuing Our Clothes: The Cost of UK Fashion, 2017)

*Thredup, The 2020 Resale Report, 2020)


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